La transmission
L’Aïkido est un art vivant. De transmission orale, sa survie repose sur sa pratique dans les nombreux dojos qui aujourd’hui existent à travers le monde entier depuis la disparition de son fondateur Morihei Ueshiba (14/12/1883 – 26/4/1969).
C’est art martial se transmet dans des écoles (ryu) et ne se prête pas à la compétition. L’enseignant reproduit des gestes séculaires que l’élève tente de s’approprier. Paradoxalement l’apprenti aide sans le savoir implicitement la progression de son maître. Le retour de l’apprenant étant souvent l’image de l’enseignant, la pratique transmise est souvent le propre reflet de l’enseignant. Le rôle essentiel du professeur est de donner une autonomie de pratique à chacun. Progressivement chacun expérimente les principes qui régissent la pratique pour se les approprier.
C’est par l’immense travail de Kisshomaru Ueshiba, le troisième fils du fondateur que l’Aïkido se codifia. On parle actuellement d’un catalogue des techniques, qui permet entre autre de faire passer des grades, du 6ème kyu (début de la pratique : 6,5,4,3,2,1 kyu) au 4ème DAN, les grades supérieurs étant des grades honorifiques.
Ainsi dans chaque dojo, chaque professeur laisse une trace de sa pratique. Avec un œil avisé, on peut facilement deviner la descendance, la forme de tel ou tel expert. Ainsi, à l’Aïkikaï de Tokyo (Hombu Dojo), maison mère d’où émergent les principaux experts (Yamagucchi, Tamura, Endo, Yasuno…) sous la conduite du dernier descendant de la famille Ueshiba. De leur expertise prégnante, on peut définir que tel ou tel pratiquant suit tel ou tel enseignement. Ainsi, en France, la pratique de Maître Christian Tissier (seul 8ème DAN en France) imprègne la substantifique moelle des très nombreux enseignants qui le suivent régulièrement. De même, l’enseignement de Maître Nobuyoshi Tamura (1933-2010) a marqué une génération d’enseignants actuels qui s’affichent fièrement et singulièrement comme son élève (uchi-deshi), son descendant direct.
En Aïkido et dans de nombreux arts martiaux c’est l’étude par la copie qui régie l’héritage de la pratique (mitori geiko). L’idée fondamentale est que le savoir-faire n’est pas transmissible. Le pratiquant s’il veut progresser dans sa pratique doit à un certain moment de son étude voler au maître ce qu’il peut voir et écouter. Le fait de voir permet de se passer des mots et n’influence pas l’intellect qui empêcherait au corps d’apprendre. La tête et le corps doivent évidemment travailler ensemble. On peut comprendre au niveau de l’intellect le geste à exécuter mais ce n’est que par la répétition que le corps sera capable de le reproduire.
L’enseignement traditionnel de l’Aïkido passe donc par l’imitation. Le mot, la parole pourra étayer un exercice, participer à la compréhension, mais seule la répétition de l’exercice permettra de développer des capacités à la compréhension du geste.
Pour conclure : NaraWaNu Kyô Ha YoMeNu (il est impossible de réciter un soûtra que l'on n'a pas appris). Soit en français : « c’est en forgeant que l’on devient forgeron ».